Hommage à Pascal Hodierne et Anthony Letourneur

Hommage à Pascal Hodierne et Anthony Letourneur

On y pense parfois mais on se dit toujours que ça n’arrive qu’aux autres… Et même quand on sait que  marin-pêcheur est un métier dangereux, très dangereux. Alors le 6 décembre 2019, quand j’ai appris, je me suis figé, un frisson glacé m’a traversé des pieds à la tête. « Tu n’es pas au courant pour Pascal et Anthony ? ». « Non ». Dans ce cas, on bredouille un « non » qui veut tout dire sauf « non».

La première fois que j’ai rencontré Pascal, c’était à Rennes, le 14 octobre 2015, avec d’autres pêcheurs de Normandie, du Nord, des Pays-Bas, d’Angleterre. Le bar était en danger, et avec lui de nombreux autres ligneurs de toute la Manche et de la Mer du Nord. A notre appel pour se battre contre une possible fermeture de la pêche du bar à la ligne et pour la restauration du stock de bar, il a répondu présent.

S’il fallait décrire Pascal en quelques mots, ce serait indéniablement le courage, la passion, la ténacité, la franchise, la volonté. Car lui comme nous, nous nous sentions démunis à l’époque. Seuls contre les puissants, quels qu’ils soient. Et c’est grâce à des hommes comme Pascal que nous avons eu le courage de nous battre.

Au plus fort de la crise, en 2015, c’est Pascal qui s’est déclaré candidat pour écrire à la ministre de l’écologie de l’époque, Ségolène Royal. Inutile de vous dire que nous n’avons pas eu de réponse, mais les écrits restent… Il y  décrivait la situation catastrophique engendrée par la surpêche du bar, situation durement vécue par ceux, passionné comme lui, qui le pêchent de la manière la plus douce qui soit, avec seul un hameçon.

Quand il a fallu plaider la cause des ligneurs auprès de la député de sa ville de Fécamp, Madame Estelle Grelier, c’est lui aussi qui y est allé, seul. Et il a été écouté attentivement.

A la même période qu’aujourd’hui, en décembre 2015, lorsque le Conseil Européen des ministres des pêches a rendu son verdict, nous avons tous poussé un soupir de soulagement. Les ligneurs étaient finalement épargnés. Et c’est grâce à toi, Pascal, que nous avons gagné cette bataille.

Bien sûr, il avait un sacré caractère aussi, et on s’est beaucoup engueulé au téléphone. Et c’est même grâce à une de ces engueulades, qu’on a eu l’idée d’inviter la Commission Européenne. Et oui, il faut des têtes dures comme Pascal pour nous bousculer, nous faire avancer. Et la Commission est venue, le 22 septembre 2016 à Sainte-Marine, Finistère, et il y avait Pascal bien sûr, avec beaucoup d’autres pêcheurs. C’était un grand moment pour nous, et encore une fois, c’est grâce à toi que cela a pu avoir lieu.

Plus récemment, c’est Anthony qui m’avait contacté. Il avait le projet de s’installer comme ligneur aussi, et bien sûr, de défendre le métier et la ressource de bar. Qu’il soit embarqué sur le bateau de Pascal m’a semblé logique, tellement logique… Je n’ai pas connu Anthony mais ces quelques échanges m’ont fait comprendre que la Petite Pêche pouvait compter sur un nouveau soutien de qualité, et ce genre de choses, je l’apprécie par-dessus tout. C’est ce qui me fait avancer, c’est ce qui fait ma fierté de travailler pour les pêcheurs, avec des gens aussi passionnés et engagés qu’Anthony et Pascal.

Alors voilà, nous n’avons pas seulement perdu deux amis, deux collègues, nous avons perdu deux personnes d’une qualité inestimable. Un pilier de la Plateforme de la Petite Pêche, Pascal, et un futur patron pêcheur, Anthony.

On espère que le bar se porte mieux qu’ici, là-haut, et que vous avez retrouvé le Mordu pour y continuer votre métier. Le plus beau métier du monde.

Ken